[s. d.]

Guy Marais, Furetiriana

Paris, Guillain, 1696

Des diverses manières de rire au théâtre

Typologie des rires des spectateurs au théâtre, associées à un type de public et à une participation au succès de la pièce.

Arlequin a quelquefois donné sur le théâtre des manières de rire suivant les voyelles. Voici ce qui s’est trouvé dans ses remarques sur cette matière.

Il y a quatre sortes de rires vicieux. Le premier est de ceux qui rient continuellement et pour rien : ce sont des personnes dont la rate est si délicate que la moindre impression les emporte en des éclats de rire fort ridicules. Nous avons besoin de ces gens-là pour faire valoir nos pièces. Le second est le rire des Sibarites, c’est à dire des personnes molles et efféminées, qui semblent en riant n’oser trop ouvrir la bouche, de peur et de se faire du mal. C’est là le ris ordinaire des loges. Le troisième est le rire sardonien, qui est un rire forcé, fin et grotesque, ainsi nommé d’une herbe de ce nom, qui force la bouche à s’ouvrir et à faire paraître un espèce de rire lorsqu’elle est frottée. C’est là la manière de rire des petits maîtres, qui embarrassent quelques fois notre théâtre. Le quatrième est le rire des Zoïle et des médisants, appelé risus megaricus, parce que les Mégariens étaient fort sujets à ce vice. Ce dernier est le pire de tous, à cause qu’il a pour but la perte de l’honneur du prochain. Nos pièces ne tombent que par ces rieurs, ils se placent ordinairement au fond du parterre.

Ana disponible sur Gallica.


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